T’avais prévu de profiter de quelques jours après le festival, sans cours, sans entraînement, sans rien, pour rentrer chez toi, Nao. Vraiment, tu t’étais dit que c’était le bon moment, pour que ça arrive. Le problème, c’est que tu te rends bien compte que tu n’as pas envie de partir loin de la vie que tu mènes entre Karanes et Trost, et au camp d’entraînement. Pour te cacher, tu diras que c’est pour te concentrer sur ton entraînement. Dans la vérité, c’est que tu as bien ressenti un certain plaisir à entraîner Leith avec toi, ce weekend, et tu crains que si tu t’en éloignes, il ne finisse pas simplement… disparaître ? Étrange oui. Et puis, maintenant, tu as une autre idée en tête. Te changer les idées et trouver une bonne excuse pour rester… et quoi de mieux que de tomber nez à nez avec le visage sombre d’Amy, ses mains pleines de terre, tant et si bien qu’elle a fini par s’en barbouiller sur le visage aussi.

« Coucouuuu ! Tu arrives derrière elle, mais tu reconnaîtrais sa crinière entre mille. Et puisque t’as jamais eu peur de cette fille, même si elle peut s’énerver d’un coup, tu en profites pour lui sauter au cou, et retomber assise, sur ses fleurs, en souriant. Eh beh, ma petite Amy, tu fais une sale tête ! C’est tes fleurs qui te rendent grognonne, aujourd’hui aussi ? »

Tu lui souris, tu viens même plaquer tes lèvres contre sa joue avant que ne lui prenne l’idée de te repousser brusquement, et tu finis par basculer sur tes pieds, la relâcher, mais rester accroupie pas bien loin d’elle. Pendant quelques secondes, tu l’observes, avec ce sourire enflammé que tu as pour tout le monde, mais un peu plus chaleureux encore parce qu’Amy est une amie et que tes amies ont un poids particulier dans ton coeur.

« Tu devrais sourire, pourtant ! Tu as finalement mis les pieds à la Fête du Solstice, cachottière ! Je t’ai vu au loin, avec un des lots de la tombola… Tu te retiens de dire que tu as repéré un jeune homme à ses côtés, parce que tu te dis qu’il vaut mieux attendre un peu, connaissance Amy. Tu as gagné, alors ? Tu en as de la chance, moi j’ai perdu mon premier ticket, comme toujours. »

Et tu finis par venir mettre tes mains dans la terre pour l’aider à finir de repiquer ses jolies petites fleurs, avant de te relever en tapotant tes mains sur ton mini-short noir, et lui tendre la main, pour la pousser à suivre le mouvement.

« Tu en as fini ici ? Va chercher ton argent et allons boire un verre à la taverne ! »

Tu t’es rarement autant agacée en juste … replantant des fleurs. Parce que, ça fait quoi ? Deux heures que t’y es, hein. En train de retirer les pots, de faire des trous, de replacer les fleurs, c’est déjà ton troisième parterre, dans le même foutu jardin, et à côté de toi, t’as le fichu croquis que la madame elle t’as filé pour que tu places les fleurs bien correctement comme elle veut. Mais clairement, hein, t’es pas trop à ce que tu fais là, t’es énervée, t’es plus frustrée, du moins, c’est ce que tu te répètes en boucle pour t’en convaincre, mais t’es tendue, et sur les nerfs, du coup, c’est pas tellement une amélioration.

Et tu sais quoi ? Voilà que la rouquine débarque. Toujours aussi enjouée, t’as jamais compris comment elle faisait son compte pour vivre comme ça, mais soit, tu l’aimes bien, du moins, t’essaies, du coup, tu te plains pas, tu la laisses faire, même quand elle vient t’enquiquiner à te sauter au cou. « Putain Nao, fait gaffe, tu vas écraser les fleurs avec tes fesses là ! » Ouais, forcément, tu râles et en plus, t’as pas dit bonjour. Disons que c’est ça, ta façon de dire bonjour, à toi. Pas conventionnel, mais au moins ça te ressemble. « J’suis toujours grognon. » Que tu grognes, alors qu’elle se décale enfin et que toi, tu te presses à foutre les derniers plants en terre.

Pis elle vient te coller un gros bisou sur la joue, pis elle se met à te filer un coup de main avec les fleurs, et toi … tu souffles, un grand coup, putain, parce qu’il fallait qu’elle revienne foutre cette fête nulle – dans tous les sens du terme – sur le tapis, et que ça t’irrite aussitôt. « Ah. Ouais. C’était pourri. » Bah tiens. « Pis j’ai gagné un truc d’merde. Du whisky. Ça sert à rien, ça pue et c’est dégueulasse. » Et surtout, au final, t’as dû te démerder pour rapatrier la caisse, toute seule, ça pesait une tonne et devine quoi ? Et bah t’es conne. T’aurais largement pu te faire une petite fortune si t’avais revendu les bouteilles hein, à l’unité, ça t’aurait rapporté un max. T’es rentrée, en rage, t’as ouvert la foutu caisse, t’as maté les bouteilles et puis … Rien, du tout, t’as refermé le machin, et t’y a plus touché. Juste parce que … ouais, il a dit qu’il voulait pas que tu les vendent, du coup, tu le fais pas. T’es qu’une grosse conne. Tu perds un tas de fric pour sa pomme à ce gros con.

C’est rageusement que tu finis avec les fleurs, pis ouais, tu vas juste récupérer ce qu’on te doit, c’est pas mal aujourd’hui, t’es satisfaite, alors tu souffles, et te voilà à coller tes mains dans les poches de ton pantalon, pour emboîter le pas de la petite rousse jusqu’à la taverne. Tu te poses à une table, au hasard, en te laissant tomber, sans aucune grâce sur une chaise, pour mettre tes pieds sur celle qui se trouve juste à côté, en soupirant. « Hé Hell ! Apporte un truc bon, là ! » Un truc bon, c’est du cidre, quoi. « Bien joué pour la course au fait. » Ouais … madame la première place, avec l’autre type là. Toi aussi, tu l’as bien vue, même si t’as rien dit, t’avais bien trop la rage.

Ahlalala, ta mère te verrait, aujourd'hui, elle te dirait que tu choisis bien mal tes amis. Entre Jude qui n’a peur de rien, Olympe qui t’entraîne autant que tu l’entraînes, et maintenant Amy, qui ne te répond même pas un bonjour, tu es entourée de drôle de personnes quand même. Toi, pourtant Nao, ça te plait, parce que chaque personne que tu fréquentes, elle t’apporte quelque chose. Et tu vois, Amy, elle a beau râler et faire la tête, elle t’a aussi endurcie, elle t’as montré la vie telle qu’elle est, sans fioriture. Accessoirement, c’est l’une des rares à qui tu as parlé de ta famille parce qu’tu sais qu’elle, elle ne cherchera ni à expliquer le comportement de tes parents ni à te donner des conseils.

« C’est pas faux, mais t’as l’air particulièrement en colère, aujourd’hui. On dirait que tu vas arracher la tête de tes fleurs… La grand-mère a dû être sacrément chiante pour que tu fasses cette tête ! »

Tu ris un peu. Après tout, il vaut mieux en rire qu’en pleurer quand elle fait cette tête-là, et tu l’aides, à en finir de ses fleurs, puis à se remettre debout, et t’as juste le temps de parler de la Fête qu’elle démarre au quart de tout. Elle répond en t’emportant vers la taverne où tu viens travailler les weekends pour mettre un peu d’argent de côté et puis quand t’arrives, si elle réclame à boire à Hellebore, toi, tu voles vers la jeune femme et tu poses un baiser sur sa joue, qui fait roucouler des types ivres pas loin, avant de t’installer avec elle.

« Ohh du whisky c’est bon, ça, non ? T’en as jamais bu, mais bon t’as pour ainsi jamais bû alors bon. T’aimes pas ? Tu peux pas l’offrir à quelqu’un qui aime, au pire ? Bien sûr que tu ne penses même pas à le revendre, toi, qui fais un million de cadeaux par année. Au moins, t’as pas dû le porter… »

Tu finis quand même par laisser échapper, en essayant de trouver du positif à son histoire. Et bon, tu te grilles rapidement dans la foulée. Te voilà, à aider Hell qui revient avec un plateau et des verres avec une bouteille de cidre (l’un des rares trucs que tu tolères bien, tiens) et quand tu t'assoies, t’as un sourire immense, qui crève le plafond, même.

« Merciiii ! C’était trop trop trop bien ! Leith a été super grognon, mais j’ai réussi à l’entraîner pour qu’on gagne et au final, il faut croire qu’on peut s’entendre suffisamment pour ça. Toi aussi, tu as fait une bonne épreuve, Amy, c’est juste que le garçon qui était avec toi semblait perdu, le pauvre. Il avait pas fait une insolation ? »

C’est ce que tu te dis, en tout cas, parce qu’il semblait vraiment complètement à l’ouest de la course et des volontés de la jeune femme. Et toi, t’es toujours trop gentille, alors tu t’inquiètes un peu que le pauvre garçon ait été malade.

Tu bosses, tu bosses, tu bosses encore, tu ne fais que ça, tiens, de bosser, ma grande, en ce moment. Faut dire que tu n’es pas à ton poste habituel, faut dire que, tu bosses chez les Garroway parce que, tu ne peux pas bosser à Trost, alors, forcément, t’essaies de faire bonne impression, même si t’as eu quelques ennuis, ici, au début et bah … maintenant, ça a l’air d’aller. Mais ouais. Toi, t’es comme ça, il faut toujours que tu brilles, ou que tu te sentes obligée d’en faire plus que ce qu’on te demande. Tu te plies bien trop en quatre pour les autres, t’es bien trop gentille. Tiens, si le Major était dans les parages, peut-être bien qu’il trouverait le moyen de te le reprocher, ça aussi, Hell.

Toujours est-il que, tu vois, quand t’entends la voix d’Amy, quand Nao, elle vient te coller un immense bisou sur la joue, et bien, tu vois là l’opportunité pour toi de faire une pause. Tu te hâtes donc d’aller charger un plateau, de cidre, de verres, et puis, tu demandes quand même l’autorisation d’aller t’asseoir avec les filles à Monsieur Garroway qui accepte avec un large sourire et te voilà donc à déposer tout ça sur la table, sous le nez d’une Amy qui, comme bien trop souvent, tire la tête, et d’un Naolane toujours aussi enjouée. Un contraste saisissant dit donc.

« Leith ? » Que tu finis par demander à Naolane, tout en t’asseyant à ses côtés. « T’as réussi à traîner l’instructeur tout bizarre dont tu parlais la dernière fois avec toi ? » Impressionnant, tu ne trouves pas ? Cette fille te surprendra toujours, en même, toi, t’es pas fichue de faire ce genre de trucs. Encore faudrait-il que t’ai quelqu’un à embarquer dans tes folies … et que t’ai des folies. Ouais. Tu es bien trop sage, Hellebore. « De quel—… » Oui, précisément, tu allais demander à Amy de quel type parlait la rouquine et voilà qu’elle devance, elle grogne, elle râle. Elle peste, et te voilà à plisser les yeux d’une drôle de façon, tout en adressant un regard perplexe à Nao. « C’est ça, une putain d’insolation à la con, ouais ! » Qu’elle baragouine. « Oh, bah, il a été malade, du coup ? » Que tu en viens à demander, plutôt innocemment, du coup. « C’est vrai qu’il faisait vachement chaud ce week-end … vous avez fini derniers du coup ? T’as dû être déçue … » Et ça, c’est une façon bien trop gentille de sous-entendre qu’à ton humble avis, elle a gueulé comme un putois à l’agonie. « Et ton instructeur, Nao, il était content, du coup, de passer du temps avec toi en dehors du camp ? »

Ah, enfin Hell vient vers vous, et toi, tu lui offres le plus beau des sourires (après celui que t’as eu pour ta victoire, quand même) parce que tu te dis souvent que cette blondinette, elle en fait trop. Elle t’inquiète parfois, et t’essaies aussi de la sortir, de lui montrer que le monde vaut le coup de souffler. Disons que c’est pas toujours simple hein.

« Ouais lui-même ! Je suis allée cogner à sa porte et j’lui ai dit que c’était mon anniversaire et qu’il n’avait pas le droit de me faire de la peine ce jour-là et hop, le tour était joué ! »

T’es fière comme un paon, toi, parce que bon, c’était pas complètement ton idée à la base (merci Jude) mais tu l’as embrassée à bras-le-corps sans aucun souci. T’étais trop contente d’avoir un bon prétexte et il n’a même pas freiné des quatre fers, même si, tu le reconnais, il n’était pas hyper motivé au début. Ceci dit Nao, t’as rarement vu cet homme motivé pour quelque chose, sauf quand il te crie dessus, quoi.

« Oh merde ! J’espère que ça n’a pas gâché votre weekend ? Vous êtes restés à Utopia un peu quand même ? J’espère que t’as pensé à bien le faire boire comme je te l’avais dit la dernière fois. Les insolations, ça passe crème avec des litres d’eau ! »

Et clairement t’es en train de trop parler et tu sais que dans ces moments là, quand ça parle santé, et bien tu parais plus âgé que tes 17 petites années révolues. Amy, elle, elle semble vraiment en colère, presque amère, et tu fais une grimace à Hell, avant de coller un verre de jus de pomme qui pique entre les doigts de la brune.

« Allez on trinque ! À nous trois ! Et tu souris, tu cognes ton verre avec les leurs avant de répondre. Heu… Tu as un moment de silence, tu réfléchis et tu finis par hausser les épaules. Il ne m’a pas engueulé alors j’imagine que oui ? J’ai essayé d’être agréable et de lui transmettre de bonnes ondes ! Mais toi, Hell, t’es restée ici ? Zéphyr est pas venu te voir, au moins pour te changer les idées ? Tu gonfles les joues en repensant à son “frère”. Si je le croise, je lui dirai qu’il abuse et j’lui mettrai un coup de pied aux fesses ! »

Et tu ris à cette idée, parce que si Zephyr ne fait pas vraiment peur, il est grand. Toi, avec ton mettre 65, tu vas avoir du mal à l’atteindre, c’est certain. Puis même, t’es pas douée pour te battre, parce que Amy est petite, elle aussi, mais elle s’en sort pour cogner.

« Du coup Amy, t’as passé un bon weekend, quand même ? »

Putain mais vraiment, t’arrives pas à faire passer le truc. Et c’est encore la faute de ce crétin, comme quoi, même quand il est pas là, il arrive à te prendre la tête, c’est dingue. Ça te rends … ouais, clairement amère, mais le pire, ma grande, c’est que t’en es plus tellement sur le coup de son passage entre tes cuisses, nan, ça encore, tu vois, y’a probablement bien des moyens de te le faire oublier, en fait, ce qui est mal passé, en fait, c’est son histoire nulle là, avec l’autre nana, et surtout, putain, surtout, ce qu’il a eu le putain de culot de te lâcher, comme une bombe, là, avant de se casser cet enfoiré. Il a réussi à te clouer le bec avec ça. Bordel. Il la veut pas … ELLE. Ça veut dire quoi, ça putain ? Que toi … Ouais, non, stop. Vaut mieux pas que t’y repenses encore une fois, la table, elle va voler, sinon.

Le truc, c’est que, toi, si t’essaies de pas y penser, bah les deux nanas … elles en sont à te poser des questions. A faire des hypothèses même. Et forcément, qu’elles savent rien, si tu dis rien, elles peuvent pas comprendre toute la merde que ça représente ce week-end de fête de la mort, pour toi. « Tu parles, y sait pas boire d’eau cet abruti, y s’gave que d’alcool dégueulasse. » Et vas y, continue, crache, casse-lui du sucre sur le dos. Ça t’emmerde, hein, de pas réussir à passer à autre chose ? T’aimerais bien l’oublier. Mais faut que son prénom te revienne en tête au moins vingt-quatre fois par jour.

Et t’en profites que Nao, elle cause de son instructeur là, pour souffler, pour avaler d’une traite le contenu du verre qui s’est retrouvé dans ta main, avant de claquer le verre sur la table et de t’enfoncer sur ta chaise. « T’inquiètes, t’as rien raté, c’était pourri. » Mauvaise foi, bonjour, elle avait rien de pourri cette fête, c’juste toi qui l’associe aux mauvaises choses, du coup, bah tu peux pas t’empêcher de râler.

« Nan. » Que tu finis par claquer, quand finalement, la question du week-end revient sur le tapis. « On a fait cette course nulle, on a gagné une caisse de whisky à la con, et pis on a baiser. Et c’était nul à chier. J’en avais envie, il a tout gâché, après ça, il s’est barré, et ça m’a saoulée. » … Ah bah bravo, super résumé, tout en finesse, quoi. Hallucinant, tu te demandes encore comment des filles comme elles peuvent encore te supporter parce que, bordel, tu vois déjà Hell qui fait des gros yeux et qui affiche une mine toute choquée. « Fait l’amour, si tu préfères Hellfragile. » Putain, qu’est-ce qui faut pas entendre … faire l’amour … c’pas tellement ça, hein, dans faire l’amour, y’a amour, et là, bah y’en avait pas.

T’es en train de jouer avec ton verre de cidre, quand tu te mets à donner mille conseils (trop tardifs en plus) et que tu rajoutes la paire de questions aussi. Le truc, Nao’, c’est que tu sais bien à qui tu les poses hein. Soit Amy va t’envoyer bouler en continuant de grogner parce qu’elle n’a pas envie d’en parler (c’est déjà arrivé), soit elle va déballer ses affaires sans aucune douceur. L’un dans l’autre, toi, tu sais que tu vas quand même finir par avoir tes réponses parce que t’es sacrément tenace, quand même, comme nana.

« Quoi ? Mais il a des problèmes ? Pourquoi il boit autant ? Tu t’inquiètes, tu te tortilles et tu finis par poser une main sur celle de la brune. Fais attention à lui, il a peut-être besoin de soutien, le pauvre… »

Et bon, tu viens quand même reprendre vite fait ta main, tu réponds à Hell, tu t’inquiètes d’elle aussi et ENFIN, tu viens attraper ton verre de cidre pour le porter à tes lèvres parce qu’elle te donne chaud, Amy, avec ses histoires. Enfin… ça, c’était juste avant qu’elle balance le résumé de week-end, parce que tu te retiens de tout recracher, par contre, tu t’étrangles avec et pendant de grosses minutes, tu tousses, encore et encore, les yeux débordants de larmes douloureuses avant de te calmer.

« QUOI ?! À retardement, avec toute la salle qui s’était tournée vers toi et ta toux monumentale. Comment ça vous avez…. Fais des trucs ensemble ?! Tu murmures pour ne pas qu’on vous entende, avec ton innocence qui refuse de prononcer les mots. Tu l’aimes ? Il t’a dragué ? Il t’a pas fait boire au moins ?! Tu t’inquiètes et sans le voir t’es penchée, écrasée sur la table vers Amy qui est en face de toi. Il… Il ne savait pas si prendre ?! Il t’a fait mal ? Ohlalalala, mais Amy, tu lui as dit que… tout ça, quoi ?! »

Et c’est drôle Nao, parce que tu parles tout bas, tout vite, ton visage est aussi rouge que tes cheveux et en plus tu t’es littéralement jetée sur la table pour t’approcher au plus près de la brune, alors que tu captes le regard de Hell. La pauvre, elle a l’air dans un état pire que le tien.

Bon, ok, peut-être bien que t’aurais pu formuler ça autrement. Et puis, surtout, tu craches carrément dans la soupe, là, sérieux, mais … Ouais, déjà qu’en général, t’es pas du genre à mesurer tes propos, là, forcément, tu lâches tout, d’un coup, sans prendre le temps de nuancer les trucs qui mériteraient probablement de l’être au moins un peu. Ça va quoi, Amy, c’était pas si catastrophique que ça, même toi, tu le sais. Et pourtant … Tu lâches ça comme une bombe, et quand tu vois le regard outré de la blonde, et que la rousse s’étouffe avec son cidre, et bah toi, tu retombes dans le fond de ta chaise, avec un vieux soupire, en levant les yeux au ciel, en plus.

Parce que, ouais, clairement, y’a de grosses différences entre toi, Naolane et Hellebore, des fois, c’est à se demander comme vous arrivez à vous supporter, ou plutôt, comme elles te supportent. Tu t’étonnes encore qu’elles ne t’aient pas juste … demander de plus jamais les approcher, vu que les énormités que tu sors et ton sale comportement des fois. « J’viens de te l’dire ! » Que tu grognes, quand la rouquine se met à supposément demander des confirmations. Remarquons avec quelle discrétion elle te parle de ça alors que toi, rien, nada, tu causes toujours comme si t’étais en train de parler météo de la semaine. « Hein ? » Que tu finis par lâcher, en plissant les yeux, en les fixant, à tour de rôle toutes les deux. Même Hell, tu sens qu’elle attend une réponse et toi … « Nan j’l’aime pas ! » Tu sais même pas ce que c’est que ça, l’amour, t’avais jamais rien fait au lit avec personne avant ce week-end alors, hé, faut pas trop t’en demander. « Et nan, il m’a pas fait boire ! » Tu finis par te redresser un peu. « Ni draguer. »

Et tu soupires, parce que, c’était juste sacrément bizarre, en fait, et puis … Ouais. Bref. « On a juste … voilà quoi. » Tiens, on dirait que tu te mets à avoir un peu de considération pour la petite blonde qui a juste virer au rouge tomate et qui se planque littéralement au fond de son verre de cidre en écoutant d’une oreille, certes, et en gesticulant sur sa chaise. « Si j’crois … figure toi qu’il m’a balancé que son en redemandait alors j’suppose que monsieurlegroscrétinabruti est censé savoir y faire … » Et bah visiblement, c’est pas encore passer c’truc d’ex ou tu sais pas trop quoi là, pourtant, t’as pas oublié c’qu’il t’as claqué au museau avant de se barrer. « Il m’a pas fait mal … enfin, si mais c’était … Fin’, il était pas doux, mais ça, je m’en cogne, j’ai bien aimé. » Et Hell qui se met à tousser, avant de brutalement reposer son verre. « J’ai juste pas pris mon pied quoi, je m’attendais à mieux, lui il a eu l’air de kiffé son moment, mais moi, je suis resté sur ma faim, super frustrée, parce que, hé, j’en avais super envie en fait. » Et te revoilà à soupirer, et si demoiselle Fawkes à l’air d’un volcan sur le point d’entrer en éruption, toi, t’es parfaitement calme, même pas tu rougis, dis donc. « Ouais, j’lui ai dis que c’était pas ouf, du coup, il m’a traitée de frigide, quel connard j’te jure … pis après, il m’a causé de l’autre grognasse là, et pis c’tout, il s’est barré, et je l’ai pas revu. » Et tu grimaces. Ouais. « C'est censé être nul, tu crois ? Genre, peut-être que m'attendais à un truc de fou et qu'en fait ... c'est pas ouf. »

Ohlalala, Nao, dans quoi tu t’embarques ? Nan parce que t’es sûrement pas aussi douce que Hellebore, on est d’accord sur ça, mais quand même. Si tu sais être crue, ou obtenir pas mal de trucs avec un joli sourire, t’as jamais eu l'aisance de Jude pour parler de tout sans gêne, et t’as clairement pas l’expérience d’Amy pour traiter ça comme un sujet banal. En faite, c’est peut-être là ton grand point faible, hein. Le tabou, le secret que tu mets autour de ce sujet, et toutes les idées bien ancrées dans un conte de fées qu’on t’a bourré dans la tête.

« Mais… Mais Amy, si tu l’aimes pas et qu’il t’a pas dragué alors comment… comment t’en es venue à ça ?! Tu murmures, toute peinée de ne plus rien piger. Le petit incendie est maintenant un vieux brasier moisi, à peine rougeoyant. Tu… Il te faisait envie au moins ? »

Ouais au moins quoi. Parce que si elle lui a sauté dessus sans raison, là vraiment Nao, tu ne sais pas comment tu vas pouvoir t’en remettre. Et vu la tête de Hell, sûrement que tu devrais cesser d’en parler, de poser des questions, et enterrer le sujet, sauf que t’as jamais eu d’infos toutes fraiches et vraies sur le sujet. Et toi, ça t’intéresse de savoir à quoi t’attendre en faite. Ton père a toujours dit qu’on affrontait mieux une épreuve à laquelle on était préparé… bon même s’il ne parlait certainement pas de ça.

« Oh wow… il a l’air de l’avoir sacrément mal pris… En même temps, les garçons, dès qu’on leur dit qu’ils sont nuls, ils font leur sale tête. Même à l’entraînement c’est comme ça alors peut-être sur ce sujet aussi. Tu crois qu’il faut toujours leur dire que c’est bien même quand ça l’est pas ? Mais attends… comment ça peut être bien pour toi si tu ne le lui dis pas ? »

Tu t’embrouilles ma belle, tu nages, tu coules, tu cherches et voilà qu’Amy grimace avant de rajouter un truc et là, tu restes figée avec de gros yeux. Hell est en train de disparaître de sa chaise, alors t’as ce mouvement pour serrer fort ses doigts entre les tiens, mais tu ne lâches pas la brune du regard. Et tu finis par répondre, perplexe, et littéralement en train de déconstruire tout ce que tu croyais savoir.

« Tu crois ? Ça veut dire que toutes les femmes qui… font ça tous les jours et tout, elles le font par principe que tout le monde en parle ? Mais Amy… C’était genre vraiment nul nul ? Ou c’était bien, mais pas si incroyable ? Et là tu demandes clairement pour savoir ce que tu devras t’attendre de ta première fois quoi. Ce ne serait pas parce que… heum… c’était ta… première fois ? Tu murmures, toute gênée, tout à coup. Faudrait tester avec un autre garçon… Un que tu aimes ! Ouais voilà, c’est ça la solution, trouver un amoureux à Amy ! »

Et dire que t’en es à raconter tout ça, le plus calmement du monde. Ouais, parce que, tu vois, c’est ça, le pire, ma grande, c’est que, mine de rien, plus tu en parles, et plus ça te calme. Un peu, au moins. A croire que t’avais besoin de te décharger de ça, d’une manière ou d’une autre, et même si tu es littéralement en train de faire mourir Hellebore de gêne, là, et bah … Ouais, on va dire que toi, ça te fait du bien, mine de rien.

« Putain mais j’en sais rien … » T’es quand même pas obligée d’être genre … amoureuse, pour avoir envie de ça, si ? Nan. T’es persuadée que non, toi, c’est pas comme ça que tu fonctionnes, et heureusement, tiens parce que, dans ta tête, t’es clairement pas le genre de fille qui tombe amoureuse, justement. « Visiblement, on en avait envie, c’est tout … Il a dit qu’il me trouvait belle et que je sentais bon. » Désespérant. Atrocement, désespérant, Amy. Heureusement que c’est pas que ça qui t’as donné envie de lui sauter dessus, hein, parce que, ce serait sacrément triste. « Ouais … » Oui, bah ça te parait logique, à toi, pour le coup. Quand t’y penses, il te plait hein. « Il me faisait même sacrément envie … c’était … brr. » Incontrôlable, quoi, c’est que t’essaies d’exprimer.

Et tu soupires. Ouais, il l’a mal pris, mais en même temps quoi, Amy, t’y as pas été de main morte, t’as même été bien désagréable, en fait. Tu supposes que t’as dû le blesser dans sa fierté, son égo, un truc comme ça, enfin … ouais, tu sais même pas si Andras à de la fierté, maintenant que t’y penses. « Nah, je lui ai dis … il voulait recommencer. » Ça te parait une bonne nouvelle, même si tu as refusé, parce que, t’étais bien trop énervée pour ça. « J’ai dit non, je t’arrête tout de suite. » Que tu ajoutes, en prévision. « Pis j’en sais rien putain, j’y connais pas grand-chose, moi qu’est-ce que tu crois ? » Il est là le soucis, aussi, t’es encore en train de te demander si bah, c’était juste normal, ou … vraiment pas ouf, quoi.

« J’sais pas … » Et tu grognes, là, parce que, à force de traîner partout, t’as entendu bien des histoires, de la part de vieux connards, mais aussi de la part de certaines nanas, c’est pour ça que tu t’attendais à mieux, parce que, à en écouter certaines, elles arrivent à tomber sur des mecs qui les font crier et trembler quoi. T’as pas crié. T’as tremblé. « J’sais pas … nah, pas complètement pourri, juste … ouais, pas ouf. » Ça aurait pu être pire, sans doute, n’empêche que, bah, t’es rester frustrée, et que tu vois que ça, toi. « Peut-être … putain, pis tu sais quoi ? Il a eu le culot de me dire que j’étais pas vierge ce … » Humpf, hein. « Comme si j’savais pas mieux que lui qui est déjà ou non passé entre mes putains de cuisses. » Putain, ça t’énerve, ça aussi. C’était le premier, il a même pas voulu le croire … « Raconte pas d’conneries ! » Que tu claques, finalement, en t’agitant, presque … outrée, de ce qu’elle vient de te proposer la petite rousse, là. « J’en veux pas d’un autre. » Et ça par contre, t’as fait que le marmonner, hein. « Pourquoi je vous parle de ça aussi … toi tu dragues ton instructeur et elle, bah … bah rien du tout, putain, elle a même pas un mec dans son entourage. » Sympa pour Hell, ça putain Amy …